Resident Evil 4 (2005, Shinji Mikami)

Publié le par GouxMathieu

   Alors que, plus de quinze ans après, ressortait en haute-définition cet épisode fascinant de la série de Capcom, je revenais à l'original sur Game Cube. On a oublié, peut-être, ce qu'il a représenté en son temps.

 

 

   Resident Evil 4 n'était effectivement pas qu'un épisode de plus. C'était l'épisode, celui qui allait tout révolutionner, et qui révolutionna tout. Après un troisième épisode poliment reçu, mais ronronnant au regard des précédents, et un Code Veronica entendu comme médiocre, la série n'impressionnait plus vraiment. Arriva alors, coup sur coup, deux épisodes qui réveillèrent l'intérêt : le Rebirth du tout premier, d'une beauté inestimable, encore maintenant ; et Zero, un peu plus laborieux, mais agréable néanmoins. Surtout, ils vinrent avant tout sur la GameCube, et nulle part ailleurs.

   On parlait beaucoup des Capcom Five, au début des années 2000. Un partenariat exclusif avec Capcom, pour cinq jeux qui ne sortiraient pas ailleurs, et surtout pas chez la concurrence, et surtout pas chez Sony, qui menait la danse avec sa Playstation 2. Des Capcom Five, peu restèrent exclusifs : Viewtiful Joe ou Killer 7 sortirent un peu partout, ou alors seront plus ou moins bien reçus, comme P.N.0.3, médiocre au mieux. Même Resident Evil 4, que l'on pensait trop finement programmé, s'émancipa du cube de jeu. Mais force est d'avouer que de tous ceux-là, il est encore à mes yeux irrésolument attaché à la console de Nintendo.

   Il y a, dans ce jeu, quelque chose de la révolution, et quelque chose de fascinant. Il y a une expérimentation folle, de réinventer un genre que l'on contribua à définir dans les grandes lignes, d'oser la secousse : Resident Evil 7, bien plus tard, fera de même, et avec succès encore. Il y a un talent sordide, à ciseler une aventure qui embrasse totalement son grand-guinolesque et sa nanardise, qui n'a plus honte de lorgner franchement du côté de la série B ; qui donne des lance-roquettes à des zombies, et les fait baragouiner dans un espagnol d'opérette qu'on n'avait pas entendu depuis le 19e siècle.

   Il y a, surtout, du génie dans cette aventure. En jouant sur le rythme, en alternant linéarité et espace plus ouvert — l'attaque du village est un morceau de bravoure inégalable, qui avait cueilli et la critique, et les joueurs et les joueuses —, en scénarisant davantage son parcours et en osant les phases d'escorte, Resident Evil 4 progresse dans une direction que l'on ne pouvait, à l'époque, nullement prévoir. Il ne réussit peut-être pas tout absolument, mais c'est la marque des grandes œuvres que d'oser, et de savoir se relever même après avoir manqué la reprise.

   Peut-être, bien sûr, que la peur ressentit est moindre, ou différente plutôt : car quand je le fis jadis, et j'étais à peine adulte, je ne manquais pas de sursauter quand un ennemi me surprenait, ou je tremblais d'inquiétude quand je devais compter les balles de revolver face aux hordes sectaires qui m'assaillaient. Je ne saurais comparer cela à l'ombre pesante du manoir Spencer ou du commissariat : Leon virevolte, donne de grands coups de pied circulaire, accomplit des prouesses de film d'action et troque sa pesanteur gênante de débutant pour un ballet autrement plus impressionnant.

   C'est, encore maintenant, la version du personnage que j'aime le plus. Il demeure mon petit préféré de cette tribu, peut-être avec Claire : mais je lui trouve un air terrible avec sa mèche de blondinet et sa répartie d'adolescent désinspiré. Et Resident Evil 4 a beaucoup de classe, et beaucoup de charme, on y revient très facilement, plus facilement que tous les autres. Il fonce vite et loin, on découvre toujours quelque chose de neuf. C'est une pierre de touche de l'histoire moderne du jeu vidéo : et les jeunes vieux, comme moi, s'en rappellent très bien.

 

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