Chainsaw Man (2018 - en cours, Tatsuki Fujimoto)

Publié le par GouxMathieu

   Je suis finalement peu au fait de l'actualité du manga : je regarde distraitement ce qui se fait, mais c'est surtout par hasard que je découvre les nouveautés. C'est comme cela, aidé par son grand succès, que je découvris Chainsaw Man, avec un plaisir inégalé.

 

 

   Les œuvres, qu'elles soient musicales, vidéoludiques, littéraires... ont cette façon de venir obstinément à vous, lorsque leurs qualités l'exigent. Il suffit de garder les yeux ouverts, d'être attentif à ce qui se raconte, et progressivement des choses remontent à la surface. C'est ainsi qu'il y a de cela un an ou deux, je commençai à entendre parler de Chainsaw Man.

   C'est, évidemment, l'absurdité du principe premier qui me fit venir. Un "homme-tronçonneuse", cela me semblait directement sorti de mes brouillons d'adolescent, lorsque je griffonnais des créatures absurdes et des chimères venues du plus profond de mon cervelet. Le manga, il est vrai, est parcouru de cette fougue presque puérile mais il sait la pimenter d'autres choses.

   En parcourant les planches, superbement dessinées, je ne pouvais m'empêcher de penser à Berserk, dans la façon dont la violence absolue, le gore, est représentée avec un souci du détail et une puissance sourde qui transpercent l'espace de la page pour mieux nous atteindre. Pareillement, les démons que l'on rencontre, ces mélanges grotesques de chair et d'objets, ne peut que faire penser au travail de Miura ; le ton, cependant, reste bien plus léger même s'il s'enfonce épisodiquement dans le grave.

   Chainsaw Man est un mange drôle, infiniment et pertinemment drôle, à commencer par Denji, le personnage principal de l'intrigue ; mais Aki, Power et le reste le suivent dans son énergie, leur légèreté parfois, leur naïveté, leur conviction. Il y a un véritable talent du dessinateur, ici, de savoir insuffler de la vie à des êtres de papier que l'on rencontre pour la première fois, de les camper aussi bien et aussi rapidement : ce n'est pas offert à tout le monde.

   Mais c'est encore dans ses moments les plus graves que l'histoire brille, je pense. Moins dans son intrigue elle-même, bien qu'elle me plaise beaucoup, que dans ce qu'elle cherche à nous dire sur la violence, sur l'oubli, sur le contrôle que l'on a sur nous-même et sur les autres. Chainsaw Man ne dit peut-être rien de nouveau ou d'original, mais il le fait avec une belle intelligence et une sensibilité sincère qui m'a assez touché.

   La série, toutes choses égales par ailleurs, est jeune au regard des standards des mangas, et on ne sait encore tout à fait quand ni comment elle finira, si elle finit un jour : une première grosse partie, qui peut très bien tenir en et par elle-même, s'est achevée en 2022, la direction prise par la seconde est à la fois identique, et différente. Comme j'aime les reprises, cela ne me dérange point : je reste curieux.

 

Commenter cet article