Gremlins (1984, Joe Dante)

Publié le par GouxMathieu

   Les fêtes s'en sont venues, les fêtes sont parties ; elles ont été calmes, tranquilles, sereines : je vieillis, pour ainsi dire. Cela n'empêche point de revenir en arrière cependant, vers ces œuvres qui ont traversé la jeunesse de l'un ou de l'autre. Comme souvent, ce retour rassure : Gremlins ne m'effraie plus, il m'amuse surtout et me fait réfléchir, étrangement.

 

 

   J'ai fait partie de ces enfants qui furent effrayés par les bestioles joliment dessinés par Joe Dante et sa clique. Les histoires sont toujours les mêmes : une comédie de Noël qui dégénère, des monstres qui apparaissent un peu partout dans les chambres, quelques nuits étranges et l'oubli que l'on ne rappelle jamais. À la sortie également les enfants furent dupés, les parents se plaignirent ; des mesures furent prises. Gremlins servit, quelque part, à édulcorer les films futurs pour nos enfants : on le regardera alors avec la tendresse due aux choses historiques, en rigolant un peu au passage.

   Soyons honnêtes : même adulte, il y a des choses dans Gremlins qui effraient à raison. Il y a des morts, des mutilations, des griffures : quand le sang coule, il est rouge et montré ; quand une telle est défenestrée, elle tombe grotesquement sans doute, mais c'est un cadavre, et non une comateuse, que l'on voit à l'écran. Cela n'est pas sans me faire penser, toutes proportions gardées, à L'Empire contre-attaque, comme s'il y avait quelque chose, dans ce cinéma populaire américain des années 1980, qui aimait à mélanger allègrement et le comique et l'horreur, et le léger et le grave. Un meilleur que moi mettrait, si cela n'a pas déjà été fait, ces films en relation avec la société qui les a vus naître. They Live est de cette période également : on aura donc sans doute quelque chose ici à chemin entre le Sida, Reagan, l'URSS et les cours de la bourse pour la partie sociologique de l'analyse.

   Je divague peut-être, mais voyons cela : dans Gremlins, un inventeur de pacotille rapporte à son enfant une créature mystique, et lui de se comporter nonchalamment et égoïstement. Ce n'est pas seulement une question de responsabilité, me semble-t-il et comme la morale dernière du film nous l'indique : il y a là également quelque chose engageant notre rapport à la nature et au monde nous entourant, à la façon dont nous nous positionnons vis-à-vis des animaux et leur intégration dans notre civilisation. Avant les gremlins, avant Gizmo, c'est le chien du personnage principal qui lui causera souci : il l'amène avec lui au travail, il effraie une cliente acariâtre, elle menace, textuellement, de le tuer de la façon la plus douloureuse possible.

   Certes, et à l'instar de n'importe quel dessin animé Disney, celui qui frappe l'animal est le plus bas de tous les hommes, et la chose est dite pour nous inviter à détester davantage encore, si cela était possible, cette douairière méchante. Mais je trouve l'analogie intéressante : le chien, ce loup sauvage, est à présent parfaitement domestiqué. On évoque l'idée dans le film de le remplacer par des mogwaïs, la race première des gremlins. Cela sera impossible mais non pas parce que leur surveillance doit être sans faille pour éviter les accidents, mais aussi parce qu'ils ne sont pas soumis à notre contrôle humain. Gizmo a quelque chose de l'animal imitant l'homme, de ces races des Caraïbes que l'on décrivait, en s'inspirant de ces anciennes légendes antiques.

   Je terminerai ici par quelques platitudes : ces effets qui ont peu vieilli, même si les ficelles tirant les marionnettes se voient davantage et si les maquettes sont moins vivants qu'elles ne le furent : nos regards ont évolué. Mais pour un film de Noël, ma foi, cela vaut bien une messe ; et je me remets encore de mes soirées, ce qui m'empêche ici d'aller plus loin. J'espère que l'on me pardonnera ce début d'année paresseux !

 

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